Absence de Dol lors d’une Vente aux Enchères en Ligne
Arrêt de la Cour d’Appel de Pau du 6 février 2024
Dans cet article, nous examinons l’arrêt de la Cour d’Appel de Pau du 6 février 2024. La Cour a jugé que la mauvaise qualité manifeste des photos publicitaires ne constitue pas, en soi, des manœuvres ou des mensonges de la part d’un vendeur lors d’enchères sur internet. Ainsi, l’acquéreur est considéré comme ayant été suffisamment informé du risque pris en se fiant à des photos peu claires. Par conséquent, aucun dol n’est caractérisé.
Contexte de l’Affaire
La solution dégagée par la Cour d’appel dans son arrêt Madame B contre Société AA du 6 février 2024 est claire. La Cour a estimé que le demandeur de dommages et intérêts, sur le fondement de l’article 1137 du Code civil, doit démontrer l’intention frauduleuse du vendeur dans la présentation de son produit.
Les Faits
Dans cette affaire, le litige portait sur l’achat d’un véhicule en ligne, via une vente aux enchères. Quelques semaines après l’acquisition, l’acquéreuse a formulé une réclamation. Le vendeur a proposé un remboursement de 1 000 euros à titre commercial. Cependant, la requérante a refusé cette offre, car elle avait évalué le coût des réparations de la carrosserie à plus de 5 000 euros.
Arguments de la Requérante
La requérante a fondé ses prétentions sur les articles 1137, 1231-1 et 1604 du Code civil. Elle a notamment reproché au vendeur :
- La détérioration importante du véhicule avant la vente, alors que les photos produites laissaient supposer une carrosserie en parfait état ;
- Le fait que le vendeur détenait des informations sur de nombreuses anomalies, en particulier au niveau de la carrosserie, qu’il n’a pas communiquées et a dissimulées par des photographies aux angles choisis ;
- Le rapport d’expertise amiable réalisé par le vendeur, qu’elle jugeait partial ;
- L’absence du vendeur lors de la livraison du véhicule ;
- Que le document signé lors de la remise du véhicule ne contenait aucune mention de réserves et ne constituait pas un document contractuel.
Motifs de la Décision
Pour motiver sa décision, la Cour d’appel a rappelé les termes de l’article 1137 du Code civil :
« Le dol est le fait pour un contractant d’obtenir le consentement de l’autre par des manœuvres ou des mensonges.
Constitue également un dol la dissimulation intentionnelle par l’un des contractants d’une information dont il sait le caractère déterminant pour l’autre partie.
Néanmoins, ne constitue pas un dol le fait pour une partie de ne pas révéler à son cocontractant son estimation de la valeur de la prestation. »
Analyse de la Cour
La requérante a acquis le véhicule par enchères publiques sur internet, en se fiant à des photos publicitaires. Ces photos étaient des captures d’écran en noir et blanc. Une seule présentait la carrosserie du véhicule, ne permettant pas de distinguer son état réel. Lors de la prise de possession, la requérante a réalisé des photos plus nettes et récentes, révélant les défauts.
La mauvaise qualité manifeste des photos publicitaires ne caractérise pas, en soi, des manœuvres ou des mensonges. En effet, l’acquéreuse était suffisamment informée du risque pris en se fiant à trois photos peu claires. Pour établir le dol, il aurait fallu démontrer l’intention frauduleuse du vendeur dans la présentation des publicités. Or, cette intention n’a pas été prouvée.
Conclusion
En conséquence, la Cour a jugé qu’aucun dol n’était caractérisé. Cet arrêt souligne l’importance pour les acquéreurs de biens en ligne de ne pas se fier uniquement aux photos publicitaires, surtout si leur qualité est médiocre. De plus, il rappelle que, pour invoquer le dol, il est nécessaire de prouver l’intention frauduleuse du vendeur.